Metz: Le salaire des religieux mis en cause

En Alsace-Moselle, les prêtres, pasteurs et rabbins sont payés par l’État. Une association de défense de la laïcité souhaite que cette situation, insolite en France, prenne fin.

 
L’association a demandé, mardi, au Conseil constitutionnel de mettre un terme à cette particularité locale héritée de l’Histoire.
 
Les «sages», qui ont examiné cette question, mercredi, en audience publique, rendront leur décision le 22 février. Ils devront dire, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, si une loi de 1802 qui prévoit la rémunération par l’État des pasteurs protestants est conforme à la Constitution.
 
La requête vise uniquement la religion protestante «pour des raisons de technique juridique», mais «sur le fond, c’est la rémunération de tous les ministres du culte que nous voulons questionner», a indiqué Jean-François Amedro, avocat et membre de l’Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité (APPEL), à l’origine de cette procédure.
 
En Alsace-Moselle, les cultes sont organisés par le régime dit «concordataire», datant de l’époque napoléonienne, qui a été supprimé dans le reste de la France par la loi de 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État. Cette loi n’a jamais été appliquée en Alsace et en Moselle car ces trois départements (Bas-Rhin, Haut-Rhin et Moselle) étaient allemands en 1905. «Quel est l’intérêt général justifiant la rémunération d’un curé ou d’un pasteur pour diriger une messe?», a demandé lors de l’audience Me Amedro. La nécessaire neutralité de l’État en matière religieuse «exclut toute forme de soutien financier, qui s’analyse nécessairement comme une prise de position sur la valeur d’un culte», a-t-il plaidé.
 
Évoquant un «résidu incongru de l’Histoire» qui «n’a que trop duré», l’autre avocat des requérants, Benjamin Dewhurst, a observé que «le fonctionnement des cultes ne se porte pas plus mal sur le reste du territoire», où les religieux doivent se passer de financements publics.
 

 
Un régime défendu par les élus locaux
 
Au nom des instances religieuses catholiques et juives, Antoine Marcantoni a au contraire appelé les gardiens de la Constitution à une «conception ouverte de la laïcité». En Alsace-Moselle, «l’État subventionne, mais ne s’ingère pas dans les religions», a-t-il fait valoir, arguant que le système en vigueur n’était pas incompatible avec la neutralité publique.
 
«C’est une autre façon de penser la séparation, mais cela reste la séparation entre les cultes et les pouvoirs publics», a ajouté l’avocat.
 
Le budget 2013 de l’État prévoit 58 millions d’euros pour rémunérer les quelque 1 400 ministres du culte (1 059 prêtres, 306 pasteurs et 28 rabbins) dans les trois départements concernés. Ce régime local des cultes fait l’objet d’un assez large consensus dans la région, où il est défendu par la droite comme par la gauche. Dans un communiqué diffusé avant l’audience, l’APPEL souligne que ce système, même s’il ne concerne l’exercice du culte que dans trois départements, est financé par l’ensemble des contribuables français. En conséquence, l’association «propose que les croyants d’Alsace-Moselle assument la prise en charge du financement nécessaire à leurs propres cultes».
 

En Alsace-Moselle, les cultes sont organisés par le régime «concordataire». Datant de l’époque napoléonienne,il a été supprimé dans le reste de la France par la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État.