Quand les contre-témoignages déstabilisent les pasteurs

Jamais on ne verra de pasteurs accorder un espace à ce genre de témoignages : « Monsieur X est resté longtemps interné dans une église à cause d’une pathologie quelconque, mais il n’a pas trouvé la guérison. Et c’est à l’hôpital seulement que la cause de la maladie a été diagnostiquée et que le mal a été guéri… » Car, pour eux, ce sont des témoignages déstabilisants, qui peuvent créer une fuite des adeptes et, à plus long terme, provoquer la fermeture de l’église.

Nous nous interrogeons alors sur la véracité de tous ces témoignages déversés à longueur de journée dans les paroisses et autres lieux de culte par les fidèles et les croyants. Ces témoignages sont-ils des montages pour accroître l’effectif des adeptes ? Si ce n’est pas le cas, pourquoi la moindre discussion entre les meneurs d’une église entraîne-t-elle leur séparation qui aboutit le plus souvent à la création de nouvelles sectes religieuses ? Les témoignages contraires se multiplient au sein des nouvelles entités cultuelles : « Il n’y avait pas de vrais témoignages là-bas », propos frustrés de ceux qui ont fui la première secte.

Il est certain que de nombreuses sectes religieuses naissent et se développent grâce aux témoignages. Vrais ou faux, ces témoignages ne convainquent certainement pas tous les adeptes, car chaque croyant arrive à l’église avec son problème et en cherche la solution auprès du pasteur. Quant aux pasteurs, tous les témoignages qui ont pour but de vanter les mérites de la secte et le savoir-faire religieux du pasteur sont un élément déterminant de la vie de l’église. Car les témoignages positifs confortent les pasteurs dans leur positionnement cultuel et « vendent » bien l’église.

En termes plus simples, les témoignages qui ne font pas l’éloge de la secte et de la clairvoyance prophétique du pasteur ont des conséquences fâcheuses à la fois sur la vie de l’église et sur la trajectoire religieuse du pasteur. Ces témoignages tournent autour de succès, réussites, avantages et avancées quelconques. « Maman pourquoi les pasteurs n’accordent-ils pas un moment à ceux qui ont des témoignages contraires pour parler publiquement ? » Bonne question qu’un enfant curieux à peine converti posait à sa mère. Cette maman avait de la peine à répondre à l’enfant, pour savoir pertinemment que tous les témoignages ne sont pas des vérités intouchables et que le pasteur ne peut se le permettre.

« Je suis passé à l’hôpital pour telle maladie, et les examens médicaux n’ont rien donné. C’est icij à l’églisej que j’ai pu obtenir la guérison ! » De tels témoignages sont ovationnés par les fidèles, et par le pasteur lui-même car il se trouve conforté dans son positionnement. Or il est vrai que le diagnostic de l’hôpital va de pair avec la sophistication de l’appareillage utilisé et la formation du personnel. Et ce n’est pas parce qu’un centre médical a loupé un diagnostic que le patient devenu adepte d’une église va conclure que l’hôpital a échoué et que l’église a réussi. Les spécialistes du métabolisme parlent souvent de l’hypophyse et de l’hypothalamus qui réguleraient certains fonctionnements physiologiques et créeraient de la bonne humeur en rapport par leurs sécrétions endocrines. Une simple sensation de douleur peut être éliminée par ce jeu de sécrétions internes, et si cela se passe dans une église le fidèle a tendance a crier haut et fort qu’il s’agit d’une guérison « miracle ».

Et lorsque les témoignages affluent, les églises ont tendance à perdre l’essentiel de l’Évangile, car elles accordent alors trop de temps à ces témoignages dont la plupart ne sont que des vérités propres à leurs adeptes. Ces témoignages, qui louent les mérites et les succès de la secte et du pasteur, sont orientés vers l’échec et l’impuissance du mal, autrement dit du « satanisme », et essaient de ligoter au passage certaines prouesses de la médecine. Or tout le monde sait ce qu’est un témoignage. Il peut être à but attractif ou bien à but déstabilisateur.

Pire encore, ces pasteurs privilégient certaines tranches dans les médias audiovisuels pour ne faire passer que des témoignages positifs. Si l’émission est en direct et qu’un auditeur essaie de poser au pasteur une question qui met en doute un témoignage, celui-ci se fâche et perd les pédales. Il devient clair que de nombreux témoignages sont montés à des fins précises. Le contre-témoignage peut alors provoquer l’évasion des adeptes, et c’est le pasteur qui en paie le prix fort.