Pasteur le jour, rockeur la nuit, la double vie du Japonais Sekino

Le Japonais Kazuhiro Sekino sur scène avec son groupe “Boxi rocks” le 1er septembre 2015 à Tokyo ( AFP / YOSHIKAZU TSUNO )

Le Japonais Kazuhiro Sekino sur scène avec son groupe “Boxi rocks” le 1er septembre 2015 à Tokyo ( AFP / YOSHIKAZU TSUNO )

Pasteur le jour, rockeur la nuit, le Japonais Kazuhiro Sekino mène une double vie mais avec un même objectif: convertir les foules.

L’homme de foi troque régulièrement voix douce, hymnes religieux et Eglise pour un concert endiablé sur une scène enfumée de Tokyo, qui se transforme parfois en joute musicale avec des moines.

“Nous sommes rock, les pasteurs sont rock !”, hurle au micro cet homme de 36 ans, devant un public de plusieurs centaines de personnes.

Le Japonais Kazuhiro Sekino à l'église le 27 août 2015 à Tokyo

Le Japonais Kazuhiro Sekino à l’église le 27 août 2015 à Tokyo ( AFP/Archives / YOSHIKAZU TSUNO )

Son groupe, nommé nommé “Boxi (de “bokushi”, pasteur en japonais) rocks”, réunit trois autres religieux. Ils s’adonnent à ces performances musicales en chasuble… et veste de cuir.

“J’aime Slipknot”, un groupe de néo-métal américain dont les neuf membres arborent des masques. “J’aime aussi Metallica et Megadeth”, raconte le jeune pasteur luthérien à l’AFP. “Ils peuvent paraître démoniaques du point de vue de l’Eglise chrétienne, mais ils hurlent en fait contre l’injustice dans le monde. Ils parlent de vérité, sans hypocrisie”.

Face à “Boxi”, voici “Bozu” (moine), l’équivalent côté bouddhisme.

Le moine Yoshinobu Fujioka sur scène le 1er septembre 2016 à Tokyo

Le moine Yoshinobu Fujioka sur scène le 1er septembre 2016 à Tokyo ( AFP / YOSHIKAZU TSUNO )

Crâne rasé et kimono bleu nuit, le moine Yoshinobu Fujioka, 39 ans, est lui aussi un passionné de musique. “J’adore le blues. J’adore Bob Dylan et la musique des années 60”, lance-t-il.

“Dans la vie, on est souvent heurté par des souffrances qui nous font sentir tout petits dans ce monde. J’aime chanter au sujet de cette douleur de manière tendre”, explique M. Fujioka.

– Attirer plus de fidèles –

Moine ou pasteur, tous deux espèrent via cette musique profane attirer plus de fidèles, dans un pays où moins de 2% des personnes déclarant adhérer à une religion sont de confession chrétienne et environ 46% d’obédience bouddhiste, quand 48% se réclament du shintoïsme.

Le moine bouddhiste Yoshinobu Fujioka et le pasteur Kazuhiro Sekino le 27 août 2016 dans une église luthé

Le moine bouddhiste Yoshinobu Fujioka et le pasteur Kazuhiro Sekino le 27 août 2016 dans une église luthérienne à Tokyo ( AFP/Archives / YOSHIKAZU TSUNO )

Mais pour beaucoup de Japonais, la religion est plus une formalité saisonnière, qui les mène au sanctuaire ou au temple pour les grands moments de la vie, les festivités traditionnelles et à l’Eglise pour Noël.

“Nous avons des sentiments comme tout le monde et usons du même langage, voire plus grossier, mais je veux que les gens prennent conscience de la présence de Dieu (dans leur vie). Je veux partager” cette croyance, souligne Kazuhiro Sekino, qui s’est tourné vers Dieu lorsque sa sœur est tombée gravement malade.

C’est lui qui a eu l’idée de contacter le moine bouddhiste Yoshinobu Fujioka au sujet de ces prêches musicaux d’un autre genre, et désormais les deux hommes s’affrontent sur scène plusieurs fois par an, avec la bénédiction divine.

Le Japonais Kazuhiro Sekino sur scène avec son groupe "Boxi rocks" le 1er septembre 2015 à Tokyo

Le Japonais Kazuhiro Sekino sur scène avec son groupe “Boxi rocks” le 1er septembre 2015 à Tokyo ( AFP/Archives / YOSHIKAZU TSUNO )

“Je ne sais pas si on peut appeler ça le paradis ou le nirvana, mais je pense que c’est ce que Dieu aurait voulu, et ce ne serait pas possible dans une église ou un temple”, confie Kazuhiro Sekino.

Yoshinobu Fujioka et ses compères ont aussi ouvert un bar à Tokyo où ils prêtent, autour de cocktails, une oreille attentive aux visiteurs en quête d’une meilleure vie.

“Beaucoup veulent parler de leurs problèmes et rentrer à la maison le cœur plus léger. Il est de notre responsabilité d’aller à la rencontre de ces gens”, dit-il.