Nord Mali : Le désarroi des pasteurs – Dépêches du Mali

Pendant qu’un accord est signé à Ouaga pour que la paix, la sécurité et la quiétude reviennent dans les régions du Nord du Mali, la réalité est tout autre sur le terrain. Les groupes rebelles continuent de semer la terreur parmi les populations, emportant leurs biens les plus précieux.

La volonté affichée des groupes rebelles de contribuer à l’avènement de la paix et de la stabilité dans les régions du Nord du Mali ne semble que de façade. Au regard de la réalité du terrain, où les populations sont victimes au quotidien d’attaques et d’enlèvements de bétail, les tentatives de paix semblent bien illusoires.

Un compromis de façade ?

La dynamique des négociations qui s’est soldée par la signature d’un accord devrait baisser d’un cran les agressions et les vols au Nord. Hélas ! Ce fléau poursuit son petit bonhomme de chemin avec des groupes d’individus qui s’en prennent aux biens des paisibles citoyens, menaçant ces derniers de mort.

Les razzias qui sévissaient au Nord du Mali, exacerbées par la crise sécuritaire dans cette zone, se sont déplacées dans la bande de Leré, Niafunké, jusqu’à Goundam. Le dernier épisode de ce genre remonte au dimanche 16 juin 2013, à Tondidou dans le cercle de Niafunké. Ce jour-là, un jeune pasteur répondant au nom de Hama Kola a été très mal inspiré en s’éloignant à 3 km de son hameau. Il est tombé dans le filet d’hommes armés qui l’ont obligé à détourner la trajectoire des trois cents bœufs qu’il faisait paître. Direction : la frontière mauritanienne où les bétails volés sont écoulés et cédés à vil prix à des opérateurs économiques. Le refus d’obtempérer du jeune berger a forcé ses assaillants à le cribler de balles. Il ne reverra plus jamais les animaux dont il avait la garde, à fortiori son hameau.

Si le corps de Hama, découvert au bout d’une semaine de recherches collectives par les villageois, a été retrouvé dans un état de décomposition très avancé, le gigantesque troupeau, lui, est resté introuvable. La confusion la plus totale règne autour des véritables auteurs de ce forfait. Alors que certains parlent de militants du MNLA, d’autres semblent persuadés que c’est une signature de groupes islamistes résiduels.

À la question de savoir si les forces de sécurité maliennes, sinon les autorités administratives, ont été saisies, Ali Farka Diallo, notre interlocuteur, répond : « Ce n’est pas la peine. Nous allons perdre notre temps. » En effet, souligne-t-il, les autorités locales n’ont jamais rien pu régler dans ce genre de situation, alors qu’elles sont toujours les premières alertées. « Nous ne pouvons pas nous défendre s’ils nous agressent. Les agresseurs sont toujours armés », signale-t-il avant de confier que lui-même a frôlé la mort en 1990 alors qu’il était berger. Son abdomen, qu’il n’a pas hésité à exhiber, comporte une grosse cicatrice qui a tout l’air d’une trace de balle.

Cet exemple illustre les nombreux enlèvements de bétail qui ont cours dans cette zone du Mali où la loi du plus fort prend forcément le dessus. « Comment résister face à des individus armés ou surarmés ? » lance l’éleveur dans un cri du cœur aux autorités maliennes. « Nous réclamons nos bétails volés, sinon des aides nous permettant de survivre. »

En tout cas, ce qui a cours dans les villages et hameaux du Nord n’est pas de nature à faire prospérer la paix. Ces localités sont devenues des no man’s land pour les pasteurs et leurs animaux. Esseulés, abandonnés à eux-mêmes, les petits propriétaires de bétail ne savent plus à quel saint se vouer. C’est avec la peur au ventre qu’ils arrivent à conduire leurs animaux aux pâturages.

Par David Dembélé

Depechesdumali.com