L’Eglise protestante exclut de réengager le pasteur licencié

«Cette lettre de licenciement est abominable!» a lancé un paroissien.«C’est une ignominie», a ajouté un autre. Plusieurs dizaines de personnes n’ont pas digéré que l’Eglise évangélique réformée vaudoise (EERV) licencie le pasteur Théodore Ntamack Ntamack le 21 mars en mettant la paroisse du Haut-Talent (Montheron, Froideville, Cugy et Morrens) devant le fait accompli.

Elles l’ont dit haut et fort lors d’une séance publique organisée mercredi soir au Centre œcuménique de Cugy. Une manifestation de protestation avait déjà été organisée, dimanche 3 avril devant le temple de Froideville.

«Une décision lourde»

Représentant le Conseil synodal (l’autorité exécutive de l’Eglise), John Christin a souligné «qu’un licenciement est une décision lourde et difficile à prendre. Dans ce genre de situation, c’est rarement les paroissiens qui sont au courant des problèmes existants, ce sont les collègues pasteurs.» Et d’ajouter que plusieurs personnes se sont penchées attentivement sur le dossier du pasteur licencié et «on ne peut pas revenir sur une telle décision trois semaines plus tard».

Les déclarations du conseiller synodal ont été ponctuées de d’invectives et de sifflets. Beaucoup de participants ont déploré la façon abrupte dont ce licenciement a été prononcé et annoncé.

«Avez-vous pensé à l’effet dévastateur produit sur les catéchumènes quand on leur dit que le pasteur qui les a suivis et accompagnés est brutalement congédié?» demande une bénévole. «Je n’accepte pas que les paroissiens n’aient pas parole et soient totalement laissés de côté», a ajouté Jean-Marc Borel.

Mais c’est surtout le ton de la lettre et le motif du licenciement du pasteur d’origine camerounaise qui a provoqué la colère. «Aujourd’hui, le conflit qui déchire votre paroisse autour de votre activité a atteint son paroxysme», a écrit l’office des ressources humaines de l’EERV au pasteur. Ajoutant: «Vous vous fermez à toute discussion, ne prenez rien sur vous et formulez des reproches envers tous.»

«Où est l’Evangile?»

Plusieurs paroissiens se sont étonnés que l’EERV n’ait actionné aucune commission de médiation ou la nouvelle commission des litiges mise en place par le Synode. «Où est l’Evangile dans tout ça?» s’est demandée Simone Félix.

La commission des litiges est activée lorsqu’il s’agit de personnes en poste depuis des années, dans ce cas il s’agit d’un pasteur suffragant (qui n’est pas encore reconnu officiellement) donc avec un contrat à durée déterminée, a expliqué John Christin. Il a assuré «comprendre la tristesse et la révolte» des paroissiens présents.

Présent à la réunion, Théodore Ntamack Ntamack s’est défendu de tous les griefs qui lui sont faits. «Je n’ai jamais eu les problèmes que vous évoquez, vous parlez de crise dans la paroisse, mais la paroisse est ici et vous voyez qu’elle me défend.»

Selon lui, il aurait été victime de provocations de la part de sa collègue, Maryse Burnat-Chauvy. Accusé d’avoir pris le parti de cette dernière, le président de paroisse Eric Joyet s’est défendu: «Il y a eu des tas de dysfonctionnements et j’ai écouté les deux pasteurs en octobre, ils étaient en souffrance», a-t-il dit, accusant le pasteur licencié d’avoir nié les problèmes et de s’être «enfermé dans le mutisme».

Au terme de plus de deux heures de discussion, parfois très vive, aucune décision n’a été prise – ce n’était pas le but de cette soirée. «Nous avons entendu vos suggestions et elles seront transmises», a assuré le pasteur Olivier Favrod, mandaté par le Conseil synodal pour «une démarche de pacification».

Pour l’heure, les esprits ne semblent pas vraiment apaisés. «Vous avez fait du mal à notre paroisse», a déclaré une fidèle au représentant du Conseil synodal. «Vous allez repartir ce soir mais nous, nous restons et il va falloir reconstruire notre communauté», a lancé Jean-Daniel Roy.

Théodore Ntamack Ntamack est reparti au moins avec la satisfaction d’avoir été défendu par des paroissiens: «Je réfléchis à la suite des événements, mais il est clair que je n’accepte pas cette lettre de licenciement.»

(24 heures)

Créé: 06.04.2017, 01h11