L’ACCES A LA TERRE, UN FREIN A L’INVESTISSEMENT AGRICOLE

Développer l’agriculture sénégalaise, sensée porter la croissance économique sans au préalable avoir réglé la question du foncier et la maîtrise de l’eau, s’avère impossible. Agriculteurs, exploitants familiers, pasteurs, éleveurs, banquiers, financiers tous ont constaté pour le déplorer que la question foncière constitue un véritable obstacle pour le financement de l’agriculture sénégalaise. C’est la conclusion tirée hier mardi 3 mai 2016 de la rencontre de Dakar de deux jours portant : ‘’Accroître les investissements du secteur privé dans l’agriculture au Sénégal à travers la Plateforme de facilitation des investissements’’. 

Cette question, bien que le président de la République Macky Sall ait pris l’initiative d’y apporter des solutions, en mettant en place une commission nationale devant réfléchir sur la nouvelle charte du domaine foncier, objet de beaucoup de litiges des années déjà, laisse sceptique les acteurs de l’agriculture. Ainsi, pour les acteurs (agriculteurs, éleveurs, pasteurs, banquiers, et financiers) développer l’agriculture tel que aspirer dans ce pays ne sera pas chose facile parce qu’il y a absence réelle d’investissements structurants, faute de politiques structurantes mise en place par l’Etat.

 Lesquelles politiques doivent dégager un cadre harmonieux, réglementé, viable et propice à une agriculture durable à même de tirer la croissance économique. Cela est d’autant plus important dira Mor Talla Kane, secrétaire exécutif de la Confédération nationale des employeurs du Sénégal (Cnes): «qu’il n’existe aucun pays au monde qui a su se développer sans son agriculture. Et qui, au préalable n’a pas réglé la question foncière». 

Par conséquent, poursuit-il: «Il nous faut de manière pragmatique régenter notre foncier de façon à ce que les bonnes terres soient données, rétribuées aux agriculteurs à faibles revenues pour leur permettre de se développer et les terres moins fertiles aux grands investisseurs». Se voulant convainquant, il rappelle ceci: «Léopold Sédar Senghor, en son temps, avait donné des terres à la Compagnie sucrière sénégalaise (Css) dont elle seule pouvait exploiter. Aujourd’hui, il faut faire la même chose avec ceux qui ont les moyens», a-t-il soutenu. Il a, en outre fustigé le manque de patriotisme des gros agriculteurs qui s’accaparent des intrants qu’ils revendent alors que c’est destiné aux petits exploitants. 

Mais aussi aux institutions financières comme Fonsis, Cncr, Cncas, Cms, et Oikocrédit qui, après avoir dénoncé le manque de sérieux de certains clients, trouvent le moyen de s’adosser à l’Etat pour «l’épongement» de leur dette. Ce, après avoir usé du temps de la justice qui peut durer des années. «Tout ceci concourt à anéantir les efforts de financement», regrettent les créanciers. 

Selon eux: «C’est le cadre qui n’est pas approprié pour financer l’agriculture parce que la question environnementale intrinsèquement liée à la terre est capitale et ne saurait être occultée dans le processus de financement agricole». 

Ces financiers estiment que «c’est très risquer de donner de l’argent à un agriculteur qui n’est propriétaire terrien. Et qui, du jour au lendemain peut être amené à rétrocéder les terres alors qu’il a reçu des fonds pour investir. D’où l’importance et l’urgence de régler la question foncière», ont-ils conclu.