En Alsace la rémunération des pasteurs estelle contraire à la …

C’était il y a deux mois. Le Conseil d’Etat avait été saisi par l’Association pour la promotion de la laïcité qui dénonçait le fait que des pasteurs protestants des trois départements de Moselle, Bas-Rhin et Haut-Rhin, soit rémunérés par l’Etat, ce qu’elle estimait contraire au principe de laïcité. Pourquoi protestants en particulier ? On ne l’a jamais su. Mais le fait est singulier, si l’on considère le fait que les cultes catholique et juif sont précisément dans la même situation que le culte protestant. Le culte musulman n’ayant pas, dans les départements concordataires, le statut de culte reconnu. En effet,  prêtres et rabbins, sont également financés par l’Etat. A l’époque, donc, ils avaient manifesté leur soutien à l’Union de l’Eglise réformée d’Alsace et de l’Eglise de la confession d’Augsbourg d’Alsace (UEPAL).

Le Conseil constitutionnel a donc tranché et donné tort à l’Association pour la promotion de la laïcité. La rémunération des pasteurs n’est donc pas contraire à la Constitution. Dans son avis, il rappelle que les dispositions de la loi du 9 décembre 1905 selon laquelle « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte », n’ont pas été rendues applicables aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle dans la mesure où ils n’appartenaient plus à la France au moment où cette loi sur la laïcité à été promulguée. Ils continuent donc de relever de la loi du Concordat de 1801, ratifiée par le Pape Pie VII et Napoléon Bonaparte. L’avis du Conseil Constitutionnel rappelle également qu’en proclamant que la France est une « République. . . laïque», « la Constitution n’a pas pour autant entendu remettre en cause les dispositions législatives ou règlementaires particulières applicables dans plusieurs parties du territoire de la République lors de l’entrée en vigueur de la Constitution et relatives à l’organisation de certains cultes et, notamment, à la rémunération de ministres du culte. »

Mettre fin au Concordat est une idée récurrente chez les partisans d’une laïcité intégrale. C’est aussi un des sujets les plus tabous en Alsace-Lorraine où le Concordat fait partie de l’héritage historique et culturel. François Hollande avait ainsi suscité un tollé au Bourget en janvier 2012 en déclarant vouloir inscrire la loi de 1905 de séparation entre l’Eglise et l’Etat dans la Constitution. Gêné par l’ampleur de la polémique et l’inquiétude des responsables religieux, le candidat Hollande avait alors précisé qu’il n’avait jamais été question de revenir sur le Concordat. Quatre jours plus tard, il publiait d’ailleurs ses « 60 engagements », où il se proposait « d’inscrire les principes fondamentaux de la loi de 1905 sur la laïcité dans la Constitution » en insérant, à l’article 1er, un deuxième alinéa ainsi rédigé : « La République assure la liberté de conscience, garantit le libre exercice des cultes et respecte la séparation des Églises et de l’État, conformément au titre premier de la loi de 1905, sous réserve des règles particulières applicables en Alsace et Moselle. »

La question divise. Les détracteurs pointent un coût trop élevé et une contradiction du principe de laïcité. Les partisans estiment qu’il favorise le bien-vivre ensemble. La Vie avait d’ailleurs organisé un débat sur le sujet à Strasbourg lors des Etats généraux du christianisme 2012 : « Le Concordat : atout ou problème sur la laïcité ? ». Au cours de cet échange animé par Olivia Elkaïm, le chercheur François Messner avait ainsi apporté un éclairage intéressant sur la question en l’abordant sous l’angle de l’institutionnalisation : « Le pluralisme religieux est institutionnalisé, ce qui permet de créer du lien social, dans le respect des droits fondamentaux ».

Le président de l’UEPAL Jean-François Collange n’a pas tardé à réagir. Dans un communiqué, il a tenu à “exprimer son soulagement et remercier en particulier Jean-Pierre Grallet, archevêque de Strasbourg et René Gutmann, le Grand Rabbin du Bas-Rhin, pour leur solidarité”, tous en précisant qu’il retrouverait au plus vite les responsables et conseillers juridiques” pour voir quels enseignements et quelles perspectives tirer de cette réponse”.