Brian et Bobbie Houston, pasteurs et producteurs pop-rock

Onzième épisode de notre série spéciale sur les maîtres spirituels. Découvrez ici les portraits exclusifs de personnalités religieuses du monde entier.

1°, Heidi Baker, la “soeur Emmanuelle” des évangéliques

2°, Ovadia Yossef, une autorité rabbinique charismatique et un leader controversé

3°, Mgr Louis Portella Mbuyu, l’évêque congolais qui dit non

4°, Dadiji, une certaine pratique de l’hindouisme

5°, Daniel Bourguet, l’ermite protestant de Saint Jean du Gard

6°, Yisrael Meir Lau, l’enfant de Buchenwald passe le relais

7°, Shane Claiborne, le chrétien qui occupe Wall Street

8°, Mohammed Sa’ad Abubakar, le sultan qui résiste à Boko Haram

9°, David Yonggi Cho, le pasteur de la plus grande Eglise du monde

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« Venez tels que vous êtes ! », ce slogan de la chaîne de restauration McDonald’s pourrait être placardé à Sydney, à l’entrée de la plus grande église d’Australie, Hillsong, tant l’accent est mis sur l’accueil et l’épanouissement des jeunes fidèles. Chaque dimanche, 20.000 Australiens, entre 18 et 30 ans, se rendent dans cette église géante créée en 1983 par le couple néo-zélandais Brian Houston, 59 ans, et son épouse, Bobbie, 56 ans. Chemise noire, sourires impeccables et brushing bien lissé, le couple soigne son image toujours en accord avec les canons esthétiques du moment. Ils prêchent, chantent, écrivent et enregistrent des DVD d’enseignements bibliques. « J’ai deux grandes passions, explique Brian Houston, sur le site de Hillsong. L’une est de construire l’Eglise de Jésus-Christ et l’autre est d’élever la vie des gens et les aider à réaliser leur potentiel dans la vie ».

Au coeur du succès de Hillsong, la louange pop-rock chrétienne est presque aussi importante que Jésus. Brian Houston est le producteur exécutif de la branche commerciale de l’Eglise : « Hillsong Music Australia ». Chaque année, la sortie de l’album live, « Hillsong Music » est un succès commercial. Il se retrouve dans le Top 10 du classement australien regroupant toutes les musiques séculières. En 2010, 11 millions d’exemplaires ont été écoulés avec une soixantaine d’albums diffusés dans 90 pays.

La notoriété musicale de Hillsong est telle qu’elle attire des jeunes au-delà des frontières australiennes. En 2013, 9 succursales de l’Eglise des Houston existent au Cap, à Stockholm, à Kiev, à Londres, à Berlin et à Paris. Dans le quartier Montparnasse, au théâtre Bobino, 600 jeunes participent chaque semaine aux quatre cultes du dimanche, ils chantent à pleins poumons et suivent une prédication en anglais traduite simultanément en français.

Bien loin du sud parisien, l’histoire du couple Houston débute sur la plage de Papamoa, en Nouvelle-Zélande. Bobbie rencontre Brian lors d’un camp de jeunes chrétiens. Lui a grandi dans une famille dont les parents sont officiers de l’Armée du Salut. Ils se marient en 1977 et s’installent en Australie où Brian devient pasteur des Assemblées de Dieu (ADD), l’une des principales dénominations évangéliques au monde. En 1983, ils reprennent l’Eglise créée en 1978 par le père de Brian et le premier culte Hillsong a lieu dans le hall d’une école publique de la banlieue de Sydney.

Encadrement rigide, voire autoritaire

Dés 1988, le label « Hillsong Music Australia » est fondé et la louange devient la marque de fabrique de l’Eglise. Pour Marion Maddox, professeur à l’université Macquarie, à Sydney, le succès de Hillsong repose sur le couple Houston, sa volonté et sur son sens aigu du marketing. « Leur communication est apparemment informelle et décontractée alors qu’elle est très réfléchie, explique-t-elle. Ils arrivent à offrir une image d’eux-mêmes très positive tout en plaisantant sur leurs défauts ».

Pourtant, Hillsong est souvent critiquée pour son star-système et ses prédications superficielles. « Manifestement, cela ne dérange pas les 20.000 fidèles que se rendent à leur culte tous les dimanches, relève Marion Maddox. Par contre, comme dans d’autres Eglises géantes, il y a beaucoup de turn-over, la foule cache la minorité qui était présente cinq ou dix ans auparavant ». Pour cette spécialiste de Hillsong : « Le message ne semble pas retenir sur le long terme. Les études montrent que les personnes qui quittent Hillsong, ou d’autres Eglises géantes, sont désillusionnées et s’éloignent de toute organisation chrétienne ».

La structure interne de l’Eglise révèle un encadrement rigide voire autoritaire. « La gouvernance de Hillsong est proche de celle d’une entreprise et non d’une Eglise évangélique classique. Brian choisit seul tous les membres du conseil d’administration. Personne n’est élu. Quant à Bobbie, elle n’a pas de formation pastorale. Elle doit sa place au conseil d’administration au fait d’être l’épouse de Brian ».

Eglise en croissance, volontairement expansionniste, Hillsong demeure un cas d’école. Elle offre à son coeur de cible, les 18-35 ans, non seulement une musique et des cultes contemporains mais aussi une sociabilité pour les membres d’une génération lors de sorties et de groupes de prières hebdomadaires. En un mot, Hillsong offre à ses fidèles ce que d’autres Eglises chrétiennes peinent à élaborer : une culture.