L’Alsace-Moselle risque-t-elle de perdre un bout de droit local ?

Le droit local pour la rémunération des pasteurs et rabbins va-t-il être remis en cause ? Le Conseil Constitutionnel va trancher demain suite à la demande d’une association qui demande l’arrêt de la rémunération des hommes d’Eglise par l’Etat.

Le Conseil d’Etat a été saisi par une association pour la promotion de la laïcité qui dénonce la rémunération des pasteurs protestants d’Alsace et de Moselle. Le Conseil constitutionnel doit se prononcer ce vendredi 22 février sur le bien-fondé de la rémunération. En effet, l’association  pour la promotion et l’expansion de la laïcité se fend dans un communiqué de presse de la rémunération des pasteurs par l’Etat dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin. Les Eglises protestantes d’Alsace et de Moselle répondent très clairement à la demande de cette association en assurant qu’elles « sont attaquées » et s’étonnent que seul le culte protestant soit visé. Les représentants de la religion juive et catholique en Alsace-Moselle ont également apporté leur soutien à l’Eglise protestante.

Les près de 1 400 ministres du culte (1 059 prêtres, 306 pasteurs et 28 rabbins) du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de Moselle sont donc toujours rémunérés par l’Etat sur la base du salaire des professeurs des écoles. Un procédé qui a déjà 100 ans d’âge. D’après le budget 2013, l’exception d’Alsace-Moselle coûte à l’Etat la somme totale de 58 millions d’euros.

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Le Conseil d’Etat a jugé que l’affaire était suffisamment sérieuse pour être traitée par le Conseil Constitutionnel qui doit rendre une décision très attendue demain. L’association laïque quant à elle affirme que la rémunération des pasteurs était une « pratique contraire à la Constitution qui proclame dans son article premier la République comme « laïque ». Du côté de l’Eglise, assure « que l’issue de la procédure – qui pourrait avoir de graves conséquences sur le fonctionnement du protestantisme local et, au-delà sur le droit local en tant que tel – est attendue avec sérénité. »

Le droit local est applicable dans les trois départements de l’Est (Bas-Rhin, Haut-Rhin et Moselle) qui n’ont pas d’unité géographique ou linguistique, mais une histoire commune. Le terme exact employé après la première guerre mondiale est celui de droit local « alsacien-mosellan ». La loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l’Etat n’est pas applicable à l’Alsace-Moselle qui reste régie par la loi du 18 Germinal an X (8 avril 1802) comprenant le Concordat de 1801 et les Articles Organiques des cultes catholique et protestants. Les ministres du culte sont rétribués par l’Etat et les collectivités territoriales participent au financement du culte paroissial. Par ailleurs, l’enseignement religieux est obligatoire dans les écoles primaires (loi du 15 mars 1850 dite loi Falloux, décret du 3 septembre 1974), ainsi que dans les établissements secondaires et techniques, une possibilité de dispense est prévue.

Le Conseil des Sages va trancher demain. Une décision qui ne fait pas peur aux représentants de l’Union des Eglises protestantes d’Alsace et de Lorraine. Son vice-président a confié à Métro « qu’en Alsace-Moselle, il y a une particularité due à une histoire de la laïcité » et que ce « serait un profond traumatisme dans la région, où les élus de droite comme de gauche sont très attachés au droit local ».